Il était dans mes pensées, quoi que je fasse. J’étais accoudée sur le rebord de l’ilot central, dans cet appartement bien trop vide sans ma colocataire de l’enfer. Observant ce téléphone qui ne dégnait pas sonner tout en annonçant la venue d’un message, de son message, pourquoi est-ce que j’étais comme ça depuis notre rencontre ? Pourquoi mes pensées n’étaient que pour lui, ne réussissant même pas à me concentrer en cours, chose qui ne m’était pas arrivée depuis longtemps, je me demande d’ailleurs si j’ai déjà été dans un état similaire. N’ayant rien dans le ventre depuis la veille, j’attrapais un paquet de gâteaux et me jetai sur le canapé, les cheveux recouvrant la totalité de mon visage, observant le plafond à travers les quelques mèches blondes, totalement plongée dans mes pensées. Après une courte sieste, le miroir de la salle de bain m’indiqua qu’il était temps de me reprendre en main, mais un énorme pincement au cœur me ramena à la réalité et je retournais dans la cuisine pour voir que je n’avais aucune notification, si ce n’est quelques réseaux sociaux en folie et ma sœur pour savoir si j’allais avec elle voir la famille Redfox ce week-end. La gorge serrée, je retournais m’écrouler entre les coussins, la tête enfouie entre deux d’entre eux, sans même entendre la porte d’entrée s’ouvrir.

Marmonnant dans le tissu pour seule réponse, sa surprise me laissa perplexe quelques instants, ne sachant pas trop si je devais réellement bouger ou si c’était encore l’une de ses ruses pour me faire bouger d’ici. Ralant en trainant des pieds jusqu’à la salle de bain, je me retournais dans sa direction avant d’entrer dans la pièce. « Tu as intérêt à ce que ça soit croustillant ! » La menaçant d’un regard mélangé avec de la fatigue et de la déprime, je refermais à peine la porte, mettant la musique à fond sur l’enceinte, prête à chanter sous la douche. Une fois prête, du moins, dans un état largement plus que présentable, j’attrapais la laisse de ce bon vieux Hatchi et le bras de ma moitié. « Dis-moi Jazzy, qu’est-ce qui est aussi important pour que tu me sortes du canapé ? » Tout en ouvrant la porte de l’appartement pour l’entrainer à l’extérieur, j’avais plus que hâte d’entendre toute ces belles choses qu’elle avait à me raconter, mais j’étais loin de me douter de ce qui allait suivre, mon petit diablotin toujours à mon bras, les yeux pétillants prêtent à l’écouter. L’air frais de l’extérieur venait me fouetter le visage, heureusement que j’avais faits l’effort de me maquiller, sinon les personnes dans la rue penseraient que je me serais pris le trottoir. Tout en observant mes pieds, je ne savais pas si j’allais réussir à lui raconter mes problèmes, elle en avait apparemment plus besoin que moi, du moins, c’est ce que je pensais face à cette mine bien trop réjouie.

J’étais sur le point de lui demander où nous allions et surtout, le temps de marche avant notre arrivée, mais la belle devait bien me connaître, en une seule parole, elle interrompit ma lance. La balade en vaut sûrement la peine, alors je vais simplement prendre mon mal en patience et attendre, la suivre et discuter. « Des nouvelles ? Hum laisse-moi réfléchir ...» à vrai dire, je ne savais même pas par où commencer, je pense que j’allais garder le meilleur pour la fin, déjà parce que je savais qu’elle n’allait pas s’en remettre, mais aussi parce que j’avais peur de sa réaction. Son point de vue comptait beaucoup pour moi, elle était comme une sœur en plus, même si j’avais suffisamment à faire avec les miennes. « Il y a de couple là, à qui il faudrait une chambre… Ils ont été surpris dans les toilettes, je ne te fais pas de dessin bien entendu » Je ne serais pas étonnée si d’ici quelques jours, Jazzy leurs envoyer des remarques en pleine face, c’était un peu sa marque de fabrique.  Je tenais Hatchi qui avait l’air encore plus excité que moi, mais à vrai dire, j’essayais de mettre de côté cette surprise qui avait l’air de la rendre heureuse, parce que je savais pertinemment qu’elle ne me dirait rien et que j’étais incapable de me contenir.

Quitte à marcher encore un peu, je m’arrêtais devant un salon de thé pour prendre des forces. « Attend-moi un court instant. » Sans m’exprimer plus que ça sur le sujet, je poussais la porte dans un petit tintement de cloche et m’approchais du comptoir pour passer une rapide commande, sans même m’inquiéter de la réaction de Jazzy, elle avait bien trop l’habitude que je grignote quelque chose en cours de route. Retournant enfin vers ma très chère amie, lui tendant sa boisson, je buvais quelque gorgées dans la mienne. « J’ai rencontré quelqu’un, je ne sais pas si c’est quelque chose de sérieux, ou même s’il ressent quelque chose...» Je n’avais pas attendu quelle prenne tranquillement sa première gorgée de boisson et bien entendu, je ne parlais pas tout de suite de son âge, ni de son métier, elle serait capable de me penser vénale, mais surtout de me demander d’arrêter tout de suite cette histoire, avant même de l’avoir commencé. Continuant mon chemin, je n’osais même pas me tourner vers elle, sentant son regard sur mon dos, tout ça parce que j’aimais bien la faire mariner un petit peu, moi qui n’avais d’habitude que mes cours en tête, ça devait lui changer un petit peu.