Cela faisait maintenant plusieurs jours que je pensais à Jonathan, sa proposition de revenir quand je le souhaitais. J'aurais très bien pu revenir avec ma petite sœur, mais je ne serai restée que deux bonnes heures et ce n'est pas ça que je recherchais, mais d'ailleurs, je cherchais quoi en réalité ? Moi-même je ne le savais pas. J'avais envoyé un message hier soir, lui disant que je passerais certainement aujourd'hui et pourtant j'ai encore là, assise au sol à coter de mon lit, sans pouvoir décider de la tenue que j'allais porter aujourd'hui. Tout d'abord, la robe et la jupe étaient à proscrire, hors de question que je me ramène en tenue de ville, il fallait tout de même avoir un minimum de bons sens. J'optais alors pour un jean noir, un sweat de sport et des baskets, comme ça, quoi qu'il puisse arriver aujourd'hui, je pourrais soit partir en courant sans problème, soit affrontée ma peur. Laissant un petit mot à ma colocataire lui indiquant que je sortais aujourd'hui, je montais dans ma voiture, direction le ferry.

Une fois installée à l'avant du grand bateau, je prenais quelques photos de la vue, le ciel était particulièrement dégagée aujourd'hui, laissant la ville se refléter dans les mouvements de l'eau, on aurait presque dit qu'un miroir était posé sur les berges. Pendant que le ferry me mener à mon lieu de rendez-vous, une petite boule d'angoisse commençait à se former au fond de ma gorge et je sentais mon estomac se tordre, pourquoi est-ce que j'avais décidé ça sans même réfléchir un tant soit peu ? Ce n'est pas parce que ma petite sœur aimait tant passer ses après-midi ici que je devais forcément en faire de même et monter sur ses grandes bêtes. Alors que le ferry approchait du port, mon angoisse fit également demi-tour, de toute manière, je ne pouvais pas faire marche arrière maintenant que mes pieds foulaient la terre ferme. Il me restait de longues minutes à pied avant d'arriver au ranch, je pris quand même le temps d'envoyer un message a Jonathan, le prévenir de mon arriver et tout en mettant mes écouteurs dans mes oreilles, je marchais tranquillement.

La silhouette du ranch apparaissant devant moi, j'enlevais mes écouteurs pour les ranger dans mon sac à dos, observant autour de moi pour être certaine qu'aucune de ses bêtes n'arrivent vers moi sans prévenir. Ne sachant trop si je pouvais m'aventurer plus loin, je restais proche du près où nous nous étions quittés la dernière fois. Posant mes bras sur le bord de la barrière pour regarder les champs et les majestueux équidés s'y trouvant, allant même jusqu'à poser ma tête sur mes mains. De gros narines vinrent proche de mon visage, j'aurais pu hurler si ma sœur ne m'avait pas appris à rester calme en leur présence, je me redressais alors tout délicatement, posant ma main entre ses yeux pour le gratouiller, ce n'est pas si mal finalement, enfin la barrière me tient quand même bien en sécurité, pas vrai ?

Le contact de sa peau sous ma main me réchauffait le cœur, c'était une sensation très étrange dont je n'aurais su décrire à l'heure actuelle. L'animal en face de moi semblait apprécier ses caresses, après tout, ce ne sont peut-être pas que des monstres comme je l'avais vécu étant petite. L'équidé venait même à fermer les yeux, m'arrachant un doux sourire. Lorsque l'animal releva sa tête, j'eue un mouvement de recul avec ma main et observa dans la même direction. Mon sourire s'élargit lorsque j'aperçus Jonathan arrivait dans ma, pardon, dans notre direction. Réalisant une petite courbette à la suite de sa phrase, me félicitant moi-même de mettre approcher et même d'avoir osé toucher l'une de ses bêtes. « Oui c'était tranquille, il n'y a pas beaucoup de monde à cette heure-ci. » J'ai déjà connu le ferry lorsqu'il y a beaucoup trop de monde, c'est infernal, entre les gens pressés de rentrer chez eux, qui te poussent comme si cela allait faire avancer plus vite le bateau et ceux qui te pique ta place au dernier moment... M'enfin, je tacherais de le prendre à une bonne heure lors de mon retour, quitte à attendre le prochain. Tournant le regard vers la jument avec laquelle j'avais établi un premier contact, je frottais délicatement mes mains entres elles, comme pour imprégner ce geste. « Il faut bien que je fasse des efforts si je veux revenir ici plus souvent ! » Et peut-être qu'il ne veut pas de toi ici ma grande, arrête de t'imposer de partout.

Posant mes mains sur les hanches, le regard rempli de détermination, je me tournais vers Jonathan en plantant mon regard dans le sien. « Bon, c'est quoi le programme d'aujourd'hui ? Je suis d'attaque ! » Si ma sœur me voyait ici, elle serait déjà en train de me prendre en photo, pour la montrer à nos parents, qui penseraient qu'elle devient folle, même si entre nous, elle l'est déjà. Elle m'a toujours tanné pour que je vienne brosser son dada avec elle, que je lui donne des bouts de pain dur garder précieusement dans un sac de la maison, mais il était déjà compliqué pour moi, à la base, de venir ici. Aujourd'hui était un nouveau départ, j'avais besoin de changement, de mettre mes peurs de côté, du moins, essayer de les affronter calmement. Je ne savais absolument pas ce que Jonathan me réservait pour cette journée, mais j'avais vraiment hâte de découvrir. Au fond de moi, je me voyais déjà monter à cheval, le seul problème, c'est que dans ma tête ça rendait vraiment bien, mais il en serait une tout autre histoire en vrai, cramponner à mon canasson, me retenant de hurler. Pauvre bête, qu'est-ce que j'allais leur infliger.

« Rassure-moi, tu ne prévois pas de m'installer sur le dos d'un cheval ? Pas tout de suite. » La panique devait se lire dans mon visage, je venais peut-être de faire un pas en avant en venant ici et un deuxième en caressant cette jument, mais me mettre sur le dos, ça serait me jeter dans le fossé. J'attendais patiemment le programme que Jonathan nous avait concocté. Je sentais mon petit cœur battre la chamade tout en m'avouant, à demi-mot, que j'étais bien trop impatiente de commencer cette expérience.

Observant cet homme en face de moi, son visage et son sourire, je savais que j’étais à la bonne place. Non pas que je ressentais le moindre sentiment amoureux, n’allons tout de même pas jusque-là, mais je me sentais à l’aise en sa présence, comme si je pouvais lui raconter mes malheurs de la journée, ce que je n’allais pas faire bien entendu, c’était seulement la deuxième fois que nous échangions des paroles. Je trouvais d’ailleurs étrange de ne pas l’avoir croisé avant, mais j’ai tellement la tête dans mon téléphone en temps normal lorsque je viens ici, que je ne serais pas étonnée qu’il soit passé plusieurs fois devant moi sans que je ne remarque quoi que ce soit. « Ce serait quand même étrange que je mette les pieds ici si je n’étais pas un minimale intéressé. » Même si j’aimais découvrir de nouvelles choses, il m’était très difficile de me rendre dans des lieux que je n’aimais pas du tout. Observant une dernière fois la jument que je venais de caresser, la dernière phrase de Jonathan me glaça le sang, me retournant dans sa direction, le regard figé, j’espérais sincèrement qu’il était en train de plaisanter. « Je veux bien la bière tout de suite, mais pas le taureau. » Arquant un sourcil, je compris bien vite qu’il cherchait simplement à me déstabiliser et bien c’était réussi monsieur.

Le suivant jusqu'à un petit coin tranquille, il était accompagné d’un cheval, un grand machin, mais qui avait l’air relativement calme, du moins à première vue, j’en avais déjà vu pleins des comme ça, partir en furie dès que l’occasion se présentait. Pendant qu’il me parlait, je penchais la tête sur le côté pour observer ce Starky, il est vrai qu’il avait l’air réellement calme et si Jonathan l’avait choisi, ce n’était certainement pas pour que je reparte d’ici traumatiser et en pleure. J’acquiesçais dans un mouvement de tête, avec un mélange d’appréhension et d’un peu de peur. J’allais être en contact avec un cheval, un vrai, sans barrière pour nous séparer. Approchant doucement dans sa direction, il pointait désormais ses oreilles vers moi. « À ce que je vois, on est tous les deux intrigués. » Soufflant dans un rire, je continuais mon avancée vers lui, approchant ma main de ses naseaux pour qu’il me sente, je touchais son cou de l’autre. C’était chaud et doux à la fois. « Ne t’endors pas mon beau, on va avoir une longue journée tous les deux. » Me tournant vers Jonathan, un sourire jusqu’aux oreilles, accroche au visage, j’étais presque sûre que j’aurais des courbatures demain au réveil. « Je peux le bichonner un petit peu ? » Me rapprochant de Jona, attendant ses recommandations, j’avais retenu la leçon de ma sœur, chaque brosse à son utilité et ses parties du corps.

Pendant que j’attendais les explications pour brosser mon nouvel ami, j’hésitais à envoyer un message à ma sœur, mais je préférais voir sa réaction en direct, je me doutais que ça serait une grande première, elle qui voulait tellement que je partage sa passion. Bon, je n’étais pas non plus au point de faire des concours et sauter par-dessus des obstacles, je vais d’abord essayer de mettre mon pied dans un étrier, on verra après. La petite phrase de Jonathan se baladait tranquillement dans mon esprit, malgré cette peur que j’avais, l’idée de monter à cheval était vraiment tentante, mais j’avais cette appréhension de mal faire les choses, qu’il ressente ma peur ou je ne sais quoi, peur de tomber et de me faire mal, ça ne serait vraiment pas le moment, juste avant les épreuves de fin d’année

Ma main sur le corps chaud de Starky, je sentais cette peur, au fond de moi, s’éloigner petit à petit. Je ne pouvais pas trop expliquer cette étrange sensation, ne sachant si c’était la présence rassurante de Jona ou si au fond de moi, c’était une simple appréhension face à ses grands animaux. J’avais vu bien trop de fois, lors du cours de ma petite sœur, des chevaux partir au galop dans le manège, expulsant les jeunes de leurs dos sans aucun problème. On pense bien trop souvent maitrise la bête, mais il n’en est rien. Pendant que Jonathan m’expliquait les différents principes des brosses et comment les utiliser, brièvement, Starky vint pousser mon bras, comme pour demander encore plus de caresses, mon garçon, tu vas être servi avec moi, j’étouffe bien trop souvent le chat de ma colocataire avec mon amour. Attrapant la petite étrille dans ma main tout en revenant aux côtés du bel étalon, parlant bien entendu de l’animal, je passais sur son corps en faisant des petits mouvements circulaires. « Je ne lui fais pas mal comme ça ? » Me retournant vers Jonathan, le regard remplit d’interrogation. Je ne m’y connaissais absolument pas avec tout ça, je ne savais pas s’il fallait appuyer ou aller doucement, mais le but était pourtant de nettoyer l’animal, c’était bien trop confus dans ma tête.

Tout en enchaînant avec les autres brosses, me déplaçant de part et d'autres de Starky avec une aisance dont je ne me sentais pas capable, je finis par passer la tête sous l’encolure de l’étalon pour regarder Jonathan tout en rigolant. « Oh je pense que je vais attendre pour lui dire, je n’ai pas fini d’en parler avec elle sinon, trop d’émotions pour aujourd’hui. » Connaissant Ellie, je n’en avais pas fini avec cette histoire, elle allait me demander comment je me sentais, si j’avais aimé, si je voulais recommencer et en finissant par un glorieux -mais tu aurais dû me demander-. Sauf que si je lui avais demandé, elle m’aurait mis sur un étalon fou furieux qu’elle monte sans problème, je serais tombée avant même de m’en approcher. Me postant en face du bel étalon, le regardant droit dans les yeux en collant mon menton sur le bout de son petit nez, je tournais de quelques degrés ma tête en direction de Jona. « Difficile de le rendre encore plus beau. » Je dois dire que mon petit cœur battait un peu plus fort pour ce bel animal, je pourrais presque le kidnapper s’il rentrait dans ma poche. Réfléchissant à sa phrase, je haussais les épaules. « Après tout, je suis là pour apprendre n’est-ce pas . » M’approchant de ledit équipement, posant ma main sur la selle en cuir d’une qualité vraiment exceptionnelle… Ne fais pas semblant Beth, tu ne t’y connais absolument pas en qualité. Chassant mon petit monologue, je pointais du doigt le premier équipement. « Licol c’est bien ça . » Pour l’équipement, je pensais relativement bien m’en sortir, merci Ellie. Après avoir fait une rapide énumération des différents équipements, je m’approchais de nouveau de l’étalon. « Ne soit pas trop loin au cas où je m’enfuis en courant. » Ricanant diaboliquement, je m'approchais de mon nouvel ami avec tout mon attirail.

Le licol à la main pour commencer doucement, je passais la première sangle par-dessus ses oreilles et le reste sur ses naseaux, refermant délicatement les deux boucles, je commençais à avancer, l’animal à mes côtés. « Il me facilite vraiment la tâche, c’est agréable. » Et qu’est-ce que ça mettait en confiance. Jonathan était un bon professeur, me laissant expérimenter toute seule mon approche tout en restant présent si le besoin se faisait ressentir. Je pense que je vais me plaire à venir plus souvent ici, pour venir caresser mon ami Starky et voir mon ami Jonathan, que je ne caressais certainement pas entre les deux oreilles, ça deviendrait vraiment trop bizarre sinon. Après avoir fait quelques pas tranquillement, je sentais l’excitation monter en moi, c’est alors les yeux tous pétillants que je m’arrêtais devant Jonathan. « Prête à faire de moi une cavalière ? » Même si une petite voix au fond de moi hurlée de trouiller, je m’en sentais capable, non seulement parce que ce bon vieux pépère fermé les yeux en marchant, mais aussi parce qu’il y avait Jonathan, je savais qu’il ne me laisserait pas tomber comme ça, en pleine nature. Avant même d’écouter les instructions, comme une enfant à Noël, je me dirigeais vers la selle et le reste de l’équipement, je prenais d’abord le tapis, l’installant délicatement sur son dos tout en cherchant à protéger la bosse dont le nom m’échappait totalement et déposant délicatement la selle sur son dos, veillant à ne pas lui donner de coup avec les étriers et la sangle, je me retrouvais à passer limite sous l’animal, pour attraper mon amie la sangle qui me voulait du mal. « Ce n'est pas pratique d’être courte sur pattes. » Je n’étais pas naine non plus, mais mes bras avaient tendance à réduire lorsque j’en avais besoin, je vous assure ! « Par contre, je vais avoir besoin de ton aide pour ça et pour vérifier mon travail aussi ! » Je me voyais mal mettre le mord dans la bouche de Starky, je n’en étais pas encore à ce stade, j’avais bien trop besoin de mes doigts avec mes études. Si l’on me croisait pour la première fois, on pouvait voir une enfant excitée à l’idée de monter à cheval pour la première fois de sa vie, enfin deuxième mais c’était un shetland, ça ne compte pas.